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 LE BAISER
 
 
 Sur l'ardoise, un baiser volé
 Emporté par le temps au cœur d'un pétale immobile
 Posé là comme une larme séchée au vent de l'oubli
 Une perle de pluie coule sa larme sur un soleil noir
 Comme griffure criante de déchirures
 Celles des roses à épines
 
 
 Mais avec toi ma douce, mon baiser de velours
 Je ferme les yeux mon amour
 Et j'ouvre notre porte mon cours, lourd de peine
 Chasse, à ta bise, la froide bise des ans
 Sur ce nuage bleu dans tes yeux
 Sur ce regard qui me dit ce soir
 Un au revoir et mes toujours
 
 
 Je ferme les yeux mon amour
 Et je vois le jour
 Le clair jour d'après la nuit de lune
 Cette nuit des tendres discours
 Avant que nos antres se soient effleurés
 
 
 Ce jour, t'en souvient-il ?
 Quand la lumière du soleil a percé les nuages à frange d'argent
 Était-ce le printemps ?
 Avril ?
 Le baiser perce-neige après le froid d'hiver
 Était-ce l'été ou l'automne ?
 Juillet ?  Septembre ?
 Ses fleurs d'étoiles à fleur de terre, à fleur de peau
 Le feu, l'embrasure des corps célestes
 Au coin des monts mordorés
 Octobre ?
 Baisers chagrins sous une pluie de feuilles d'or
 Le temps où l'on peinturlure les mornes horizons
 Pour mieux saisir la vie
 Dans l'antre des morts gris
 Ou bien déjà l'hiver
 Décembre ?
 Les baisers de Psyché aux neigeux marbres blancs
 Baiser de soleil aux bourgeons fragiles
 Ou baiser de neige dentelée
 
 
 Baiser éternel de l'enfance
 Rêverie sans cesse recommencée à tout âge
 Chaque fois retrouvée
 Et chaque fois perdue
 Tel l'instant vécu dans d'incessantes reconquêtes
 Baiser du temps d'adolescence
 Premiers émois
 Ma bouche à ta bouche, mon souffle à ton souffle
 Et mon cœur au bord de l'abîme, avant le grand saut
 Mon corps s'offrant au désir
 Mirant, convolant,
 Sous le signe du vertige cosmique,
 Suivant l'élan de la création originelle
 Affrontant les morceaux de néant rapaillé
 Insaisissables, de filantes étoilées
 
 
 Hantise du vide des lèvres
 Aux lointains soupirs
 Je vous embrasse tendrement
 Dans le verre de mes désirs
 Dans l'eau de mes rêves aux bulles multicolores
 Et y laisse la trace soupirante, celle de l'amant
 De tout ce qu'il n'ose dire
 Et que je ne saurais vous écrire
 
 
 Je te dis "vous" dans mes espoirs
 Tempérés de scrupules et de regrets
 Je vous dis "tu" dans mes souvenirs
 Mes désirs de tendresse accumulés à vie
 
 
 Et je m'abîme dans l'immensité de tes lèvres
 Qui s'offrent dans l'abandon des passions et des tendresses
 
 
 Écrire l'âme, ô l'âme esseulée, qui s'éveille comme une fleur
 Un matin à la rosée, aux premiers désirs de la fleur éveillée,
 Ô l'âme en quête de moitié
 Toujours seule, jamais deux
 Parce jamais autant deux que lorsque seule
 Grâce à la magie créatrice de la poésie, de l'artiste
 
 
 Aux premiers baisers, fleurs enfantées de l'espérance
 Donne-moi un baiser
 Un, juste un encor
 Avant que d'expier
 L'étreinte de ton corps
 De t'avoir aimé(e) trop fort et pas encore assez
 
 
 Un baiser
 Un baiser comme aimant, un baiser langoureux
 Un baiser, celui-là, le vrai, amoureux
 Un baiser de rosée, celui désiré
 Un baiser solaire, de passion, oublieux de raison
 Un baiser océan, celui du souffle de la création
 En corps accompagné de l'esprit
 Fusion en un seul être, celui dont nous naissons
 
 
 Donne-moi un baiser mon cœur
 Avant que d'oublier ces heures
 Le cri intense de l'extase
 Du volcan qui de tous ses feux s'embrase
 
 
 Un baiser... L'envol de deux papillons vers l'extase
 Baiser de chair, baiser où le corps s'embrase
 Comme ta peau, comme un fruit mûr
 - la pêche duveteuse ou la cerise à la chair prometteuse -
 Rajoute à son charme fruitier
 Quelques couleurs dignes de l’églantier, fleur sauvage et romantique
 Ou de la rose, ourlée et capiteuse qui ne dure qu'un instant d'éternité
 
 
 Baiser de velours, lèvres capricieuses
 Donne-moi un baiser, mon âme
 Avant que nos deux corps redeviennent ombre sur écran
 Avant, hélas ! que d'effacer la sueur de nos reins
 Sur les draps de satin, nos draps câlins
 Une autre peut se montrer vaniteuse et montrer son dédain,
 Ou parler trop, médisante, menteuse
 La tienne reste adorable en entier, à peine ourlée
 Comme un fruit mûr cueilli au petit matin
 Répondra-t-elle, ardente ou comploteuse
 À ma chaleur vive et solliciteuse ?
 Elle répondra, certes, langoureuse
 Et marquée à jamais dans le temps
 
 
 Lorsque son appel au paroxysme se fera vivre
 Sentir et capable de convoler depuis les abîmes
 Premier, dernier baiser, seras-tu le portier
 Libérant l’huis qui garde le sentier
 De ce destin digne d’une conteuse
 Comme un fruit mûr, récolte des amants
 Dans la langueur voluptueuse du baiser
 
 
 Ou seras-tu l'unique clé de ma geôle
 Je n'en sais rien, mais hâte-toi
 Que tes lèvres, mes lèvres frôlent
 Je ferme les yeux, mon ange
 Sur ce nuage bleu dans tes yeux, étrange
 Sur ce regard qui me dit ce soir
 Un adieu ou un au revoir
 Un toujours ou un jamais
 Un soupir qui s'en va, un écho disparu
 Et le silence du souvenir
 
 
 Avant ton départ vers les pays inconnus
 Avant ton dernier regard vers l'infini
 Donne-moi un baiser, encore un dernier, si bon
 Comme la veuve-araignée, pardon
 Avant que de vivre le remords
 D'aimer jusqu'à ma mort
 D'aimer jusqu'à ma vie
 D'aimer jusqu'à ma mort
 D'aimer à l'infini
 Jusqu'à ce que disparaisse tout ce qui nous entoure
 Quand plus ne compte que l'amour
 Avant que ne se referme la porte, les volets
 Et qu'à d'autres amants nous laissions la clef
 Sous le paillasson de l'oubli
 
 
 Donne-moi un baiser, encore un
 Un de l'après comme ceux de l'avant
 Car notre chambre est une île sous le vent
 Sur l'océan doré des espoirs assouvis
 Des sentiments mordorés aux soleils des saisons
 Jusqu'à ce que que le cours du fleuve
 Qui porte tous nos espoirs se tarisse
 Pour mieux jaillir tel de nos amours, la source qui nous vient
        d'ailleurs
 Elle est éternelle
 Et resurgit parfois même des baisers apparemment perdus
 
 
 Un peu plus loin, toujours plus beau
 Un peu plus fort, toujours plus haut
 Demain l'aube claire de nos amours renaissantes
 Demain... ta main là sur mon cœur au rythme du tien
 Et ta bouche rouge-écarlate viendra
 Promesse tant attendue, me donner, juste une fois, peut-être mieux, encor
 Un tendre baiser
 
 
 Indélébile, caché dans les fouilles du passé, le Baiser
 est une pousse qui refleurit toujours où apparaît la vie.
 
 Baiser, souffle de Vie !
 
 
 
 Collectif du Cercle d'amis de Saison des Poètes
 
 Éloix©
 Yves Drolet©
 Ode©
 Robert Bonnefoy©
 Renée Jeanne Mignard©
 Régine Foucault©
 Pascal Lamachère©
 Bô Na©
 Pierfetz©
 
 Fin octobre 2004
 
 
 
 
 
 
  
 Oeuvre de Antonio Canova « Psyché ranimée par
        l'Amour « ou « Le Baiser » 1787-1793
 
 
 Cette page est une création de Ode©
 
 
 
   
 
 
 
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